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Débats du Sénat (Hansard)

Débats du Sénat (hansard)

1re Session, 36e Législature
Volume 137, Numéro 83

Le mardi 20 octobre 1998
L'honorable Eymard G. Corbin, Président suppléant


LE SÉNAT

Le mardi 20 octobre 1998

La séance est ouverte à 14 heures, le Président suppléant, l'honorable Eymard G. Corbin, étant au fauteuil.

Prière.

[Français]

Le décès de l'honorable Mario Beaulieu

Hommages

L'honorable John Lynch-Staunton (chef de l'opposition): Honorables sénateurs, je tiens aujourd'hui à rendre hommage à l'honorable Mario Beaulieu, décédé le 13 octobre dernier après une longue maladie. Son séjour au Sénat aura été bref, mais point trop pour que tous ses collègues, sans exception, aient été impressionnés par sa personnalité des plus attachantes.

Quant à moi, je me sens privilégié de l'avoir connu pendant au-delà de trente ans et de l'avoir côtoyé en politique à maintes occasions.

[Traduction]

Le distingué constitutionnaliste et poète Frank Scott a souvent exprimé sa déception devant le fait qu'au Canada, un pays qui possède autant de droits individuels que tout autre, il y en ait un que les Canadiens expriment rarement, celui du droit à l'échec. Il entendait par là que les Canadiens dans leur ensemble n'aiment pas le risque. Il aurait été fier de Mario.

[Français]

C'était un homme pour qui aucun défi n'était impossible. Dans sa profession de notaire, sa carrière d'homme d'affaires ou comme candidat et organisateur politique, à plus d'une occasion il a subi des revers, mais jamais il n'a perdu confiance, et encore moins été tenté de tirer sa révérence.

Avec sa personnalité des plus chaleureuses, sa générosité débordante, un esprit ouvert et positif, Mario attendait chaque lendemain avec impatience et vivait chaque journée avec une énergie indomptable. Samedi dernier, lors du service funéraire qui a réuni des centaines de personnes de tous les milieux, les propos à son égard étaient unanimes. Nous avons perdu un ami, un collègue, un collaborateur politique qui, même dans les moments les plus difficiles, ne reculait jamais et n'abandonnait ni personne, ni aucune cause même si tant d'autres étaient tentés de le faire.

Je me permets de citer un paragraphe d'un livre de la plume de Mario Beaulieu intitulé: La victoire du Québec, publié en 1971. On y reconnaîtra une appréciation des plus lucides et perspicaces de la société québécoise qui est aussi valable aujourd'hui qu'elle l'était il y a maintenant 27 ans:

Nous voyons surgir un nouveau nationalisme qui ne correspond plus au recroquevillement provincial mais à l'éclosion continentale. Nous nous devons de distinguer entre notre héritage d'hier, les nécessités d'aujourd'hui et les perspectives de demain afin d'attaquer notre défi collectif en tenant compte de ses véritables dimensions. Nous sommes Québécois de coeur et d'esprit, Canadiens de droit et Américains de fait: et c'est à partir de cette réalité que le Québec devra se définir et bâtir sa Société Nouvelle.

D'abord et avant tout, Mario fut un mari et un père affectueux et dévoué. À son épouse, Louise, à leurs enfants, François, Martine, Louis, Stéphane et Charles, ainsi qu'à tous ses proches, j'offre mes sincères condoléances.

[Traduction]

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, rares sont les politiciens canadiens-français qui ont été aussi impliqués dans les premières guerres tribales sur le rôle à venir du Québec dans la Confédération que le sénateur Mario Beaulieu. Quand il a soutenu Daniel Johnson dans la course à la direction de l'Union nationale, en 1961, la «Révolution tranquille» avait déjà enflammé l'imagination des Québécois, et les activistes, toutes allégeances confondues, réclamaient une nouvelle entente avec le Canada.

(1410)

Ce fut une décennie de débats intenses et passionnés sur l'orientation que devrait prendre la survivance, alors que l'historique rapport sur le bilinguisme et le biculturalisme avertissait les Canadiens qu'ils couraient tout droit vers la pire crise de notre histoire, une crise provoquée par les frustrations de la majorité francophone du Québec face à sa situation économique et linguistique injuste et inférieure. Au milieu de ce déchaînement des passions, Mario Beaulieu a toujours su donner l'exemple d'un loyal supporter du fougueux Daniel Johnson et d'un fier nationaliste québécois réputé pour son intégrité et sa générosité personnelle.

Après son élection à l'Assemblée nationale du Québec, en 1969, il a été ministre de l'Immigration, ministre des Institutions financières et ministre des Finances, ainsi que président du Conseil du Trésor dans le gouvernement de Jean-Jacques Bertrand. Le sénateur Beaulieu était aussi, bien sûr, un membre fidèle du Parti conservateur, c'était un esprit positif, un gentilhomme qui travaillait sans relâche à remonter le moral des troupes.

On se souviendra de Mario Beaulieu comme d'un homme attachant et dynamique, mais néanmoins très humble, qui était toujours prêt à servir l'intérêt public, que ce soit dans l'arène politique de sa chère province ou par sa contribution au Sénat du Canada. Il était toujours prêt à servir l'intérêt public sans rien attendre en retour. Même s'il a passé la majeure partie de sa vie à rechercher de meilleures conditions pour les Québécois, il voulait toujours que celles-ci incluent la tolérance, la compréhension et le compromis. Ces conditions meilleures s'inscrivaient toujours dans le cadre du concept de l'unité dans la diversité. Il voulait une grande nation qui soit plus que la somme de ses éléments.

[Français]

À sa famille et à ses nombreux amis, nous offrons nos plus sincères condoléances.

L'honorable Normand Grimard: Honorables sénateurs, je voudrais ajouter quelques mots au sujet de l'honorable Mario Beaulieu. À mon point de vue, sa principale qualité était sa générosité. Par générosité, je ne veux pas dire la question d'argent, même si nous connaissons des personnes bien nanties toujours près de leurs sous, ce qui n'était pas le cas de l'honorable sénateur Beaulieu. Il était généreux pour ses amis, en leur donnant des conseils judicieux basés sur un bon jugement. Il était généreux dans le dévouement et le temps qu'il consacrait aux bonnes causes et aux oeuvres charitables.

L'honorable sénateur Beaulieu était un homme d'affaires averti. Il a fait un succès de sa compagnie. Il a appris à ses enfants les trucs du métier. Ce sont eux qui ont pris la relève pendant la trentaine de mois qu'a duré sa longue maladie.

En politique, l'honorable sénateur Beaulieu a joué un rôle de premier plan. Comme l'a signalé tout à l'heure le sénateur Graham, il a été l'un des principaux conseillers de l'honorable Daniel Johnson et de Jean-Jacques Bertrand au sein de l'Union nationale.

L'honorable sénateur Beaulieu a occupé un poste important comme ministre des Finances. Il est bon de souligner qu'il fut l'instigateur de l'implantation de Loto-Québec dans la province de Québec.

Le sénateur Beaulieu a également été des plus actifs au sein du Parti conservateur. Ce parti a eu besoin de lui lors des années difficiles et pourrait bien profiter de ses services encore aujourd'hui.

Mario Beaulieu a parcouru la province. Je me souviens qu'en 1976, il était venu me visiter et me réconforter à Rouyn-Noranda, alors que j'étais candidat du Parti conservateur contre le fils de feu Réal Caouette, ce qui veut dire que vous connaissez d'avance les résultats pitoyables que j'ai obtenus.

Le décès du sénateur Beaulieu constitue une perte immense, non seulement pour sa famille qu'il aimait tant et à qui je présente mes plus sincères condoléances, mais également pour ses nombreux amis parmi lesquels j'avais l'honneur de me compter.

 

[Traduction]

Le décès du très honorable Brian Dickson, c.p.

Hommages

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, il est rare que nous puissions opiner sans crainte d'exagération ou d'inflation sur la désignation d'un très grand Canadien à l'occasion de son décès. Tel est le précédent que nous pouvons créer en toute sécurité à l'occasion du décès prématuré de Brian Dickson, ancien juge en chef du Canada. Dire que son décès est prématuré n'est pas exagéré, même s'il avait plus des quatre-vingts ans bibliques.

Après son départ à la retraite en tant que juge en chef, il y a presque dix ans, Brian Dickson n'a jamais arrêté de mettre ses talents irrésistibles et contagieux au service du Canada. Il est mort paisiblement dans son sommeil, le week-end dernier, à la campagne, entouré de sa famille qui l'adorait, non loin des chevaux qu'il aimait et dans la propriété qu'il entretenait méticuleusement. Il était alors au beau milieu d'un examen de la police militaire pour le ministère de la Défense nationale, après avoir présidé l'an dernier un comité civil constitué spécialement pour passer en revue notre système de justice militaire, qui avait bien besoin d'être rénové après la débâcle de la Somalie.

Pour nous, au Sénat, ses travaux ont revêtu une vitalité toute particulière ces dernières semaines pendant que nous étudiions des projets de loi concernant le système de justice militaire et l'indépendance judiciaire. «Mais qu'en pense Dickson?» est la question que nous nous sommes posée à plusieurs reprises il y a quelques semaines. C'est alors qu'il avait accepté de comparaître devant le comité sénatorial chargé d'étudier le projet de loi C-25, ayant pour objet de réformer notre système de justice militaire.

Quel plus grand hommage peut-on rendre à un juriste dont la vision, les idées, les décisions et l'oeuvre continuent à être tenues en si haute estime tant par les avocats que par les législateurs? Brian Dickson, toujours empreint de retenue judiciaire et de prudence, était à l'avant-garde de l'évolution de notre common law. Ses paroles continuent à raisonner alors que nous débattons à nouveau des questions concernant l'indépendance judiciaire, la portée et les limites de la Charte ou la frontière établie par notre Constitution entre le droit et la politique.

Le juge Dickson a joué un rôle particulièrement important en ce qui concerne les minorités, qu'il s'agisse des droits des handicapés ou des autochtones, du droit d'utiliser l'anglais au Québec ou encore du droit de la femme à décider seule de subir ou non un avortement. Dans tous ces dossiers, les décisions du juge Dickson ont toujours été favorables aux exclus et aux faibles.

Ce ne fut pas toujours l'euphorie. J'ai le souvenir vivace du différend latent qui opposait le juge Dickson à M. Trudeau et d'un affrontement retentissant au sujet du pouvoir des provinces, lors du rapatriement de la Constitution. Je me rappelle avoir entendu M. Trudeau prononcer ce qu'il considérait comme son dernier mot sur la décision de la Cour suprême, celle de la majorité dirigée par le juge Dickson, dans le discours qu'il a prononcé à la collation des grades en son honneur à l'Université de Toronto. Je me suis alors tourné pour voir le juge Dickson fulminer dans l'auditoire, face à M. Trudeau. Ce dernier mot ne lui convenait pas.

Nous pouvons entendre encore les échos de la voix du juge Dickson faisant ressortir dans la dernière décision sur le renvoi à la Cour suprême la démarcation et la convergence entre précédent jurisprudentiel et politique. L'histoire est encore trop jeune pour que nous sachions lequel de ces deux chênes résistera.

Brian Dickson, toujours très courtois, n'était pas un homme facile, et l'époque ne l'était pas non plus. Il s'attaquait à toutes ses tâches avec un soin extraordinaire, avec méticulosité, avec des idées claires. Certains d'entre nous de ce côté-ci ont lu les décisions récentes des tribunaux, si déroutantes dans leur complexité qu'on ne peut qu'espérer que l'exemple du juge Dickson amènera de nouveau les juges à rechercher la clarté, la cohésion et la retenue judiciaire dans leurs décisions.

Le juge Dickson a servi son pays en temps de guerre et en temps de paix d'une façon qui lui vaut une place spéciale dans le panthéon des grands juristes canadiens, avec les juges Rand et Hall, à qui il a succédé à la Cour suprême, le juge Spence et le juge en chef Laskin.

(1420)

Brian Dickson a été un précieux serviteur de la reine et de son pays, et sa sagesse nous manquera. Pourtant, honorables sénateurs, il ne suffit pas d'énumérer ses nombreux honneurs et ses nombreuses réalisations. Qu'est-ce qui poussait Brian Dickson à aller si souvent à contre-courant que le non-conventionnel est finalement devenu conventionnel? Était-ce la guerre, qui l'avait amputé d'un membre? Était-ce la douleur constante de ce handicap? Était-ce la fréquentation des maîtres de la common law - Bracton et le pouvoir du précédent; Blackstone et la nécessité de rendre à chacun son dû; Mansfield et la tolérance du culte religieux; ou Brougham et la réforme? Ou était-ce ses origines? Était-ce ses racines saskatchewanaises et sa perspective d'homme de l'Ouest, d'où il tirait sa propre vérité de l'inhumanité de l'homme envers l'homme, qui le poussaient à toujours vouloir redresser les torts qui devaient être redressés? C'était tout cela à la fois. C'est ce qu'on dit de la grande et magnifique vie de Brian Dickson - une vie qui méritait d'être vécue et qui mérite qu'on s'en souvienne.

Peut-être pouvons-nous citer enfin les mots suivants de Tennyson:

 

Un homme peut dire ce qu'il voudra...
Un pays au gouvernement établi,
Un pays à la juste et vieille renommée,
Où la liberté s'élargit petit à petit,
D'un précédent à l'autre.
C'est ce que nous disons. Salut, Brian Dickson! Puisses-tu reposer en paix!

L'honorable Gérald-A. Beaudoin: Honorables sénateurs, le très honorable Brian Dickson est décédé à l'âge de 82 ans. Il avait été nommé le 26 mars 1973 à la Cour suprême du Canada, dont il était devenu le juge en chef le 18 avril 1984, et il avait pris sa retraite le 30 juin 1990.

[Français]

Peu de juges, à l'occasion de leur départ, auront fait l'objet d'autant de regrets. Je formule l'espoir qu'un jour, un historien du droit lui consacrera une biographie, car il vaut la peine que l'on raconte la vie du juge Dickson.

Ce qui frappait chez lui, c'était sa courtoisie, son sens du devoir, son respect des autres, sa modestie, son amour du travail, son courage. Sur le plan intellectuel, c'est évidemment sa logique, son bon jugement, sa science du droit et son ouverture d'esprit qui retiennent l'attention.

[Traduction]

Il a été nommé à la tête du plus haut tribunal deux ans après l'inscription de la Charte des droits et libertés dans la Constitution. Cette charte est le plus grand événement survenu dans le domaine judiciaire depuis l'avènement du fédéralisme en 1867.

[Français]

Brian Dickson a modernisé la Cour suprême: en témoignent les appels par satellites, le dépôt des jugements, les plaidoiries soumises à une restriction dans le temps, les demandes d'appeler faites sans plaidoiries orales.

Sur le plan du fédéralisme, le juge Brian Dickson a su s'illustrer ainsi que l'indiquent les arrêts Location résidentielle, General Motors, O'Hara et Alberta Government Telephones. Il occupe le rang des Beetz, Duff, Laskin, Rinfret, Rand et Pigeon, pour ne nommer que ceux qui nous ont quittés.

Sur le plan des droits et libertés, l'avenir dira que le juge Dickson fut parmi ceux qui auront exercé l'influence la plus profonde et la plus durable. Il n'a pas manqué de souligner que les trois branches de l'État - législatif, exécutif et judiciaire - ont un rôle à jouer dans le domaine des droits et libertés.

La Cour suprême du Canada a rendu 354 arrêts sur la Charte canadienne des droits et libertés. En 1985, lors d'un colloque tenu à Ottawa sur la Cour suprême du Canada, le juge en chef Dickson déclarait que la Charte de 1982 constituait le plus grand défi de l'histoire de la Cour suprême du Canada. Cette dernière cour s'est fort bien acquittée de sa tâche. Son oeuvre force l'admiration! Plusieurs juges actuels de la Cour suprême ont su en peu d'années s'illustrer sur ce plan.

Le juge en chef Dickson, dans l'arrêt Big M. Drug Mart, a énoncé, pour la première fois, le test de la proportionnalité et, dans l'affaire Oakes, il a établi au nom de la cour les critères d'application de l'article 1 de la Charte. Ce test guide les juges. Nombreux sont les autres arrêts de la Cour suprême sur la Charte des droits et libertés où il s'illustra.

Le très honorable Brian Dickson s'est illustré dans plusieurs autres domaines du droit public et du droit privé. Il toucha à de nombreux domaines du droit. Sa productivité fut constante.

Je suis impressionné par les nombreux jugements qu'il a rendus. Il a rédigé des notes unanimes, claires et précises. En témoignent de façon particulière les arrêts Hunter, Mahé, General Motors et Vérificateur général (Dye).

Il fut l'auteur de dissidences remarquées, comme dans l'affaire Public Service, qui porte sur le droit de grève, et dans plusieurs arrêts en droit criminel.

[Traduction]

Certains jugements qu'il a rendus resteront dans l'histoire. Il était plein d'énergie. Sa réputation dépassait nos frontières. Il avait établi des rapports et des liens de communication avec les juges en chef d'autres démocraties.

[Français]

Il a participé à la vie universitaire. Je souligne sa participation au colloque sur la Cour suprême du Canada organisé par l'Université d'Ottawa en 1985. Il fut également l'un des inspirateurs du colloque d'août 1997 sur le «Fédéralisme de demain», tenu à l'Université d'Ottawa. Le juge Dickson aura formé des disciples.

Brian Dickson aura eu la grande satisfaction de constater que son travail acharné a été fort apprécié par les hommes et les femmes de son époque.

Un grand juriste, un homme aux qualités humaines hors de l'ordinaire vient de nous quitter.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Le mois de l'histoire des femmes

Louise McKinney-La première femme députée de l'Assemblée législative de l'Alberta

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avant le congé, j'avais parlé pendant la période réservée aux déclarations de sénateurs pour vous rappeler qu'octobre était le Mois de l'histoire des femmes. À cette occasion, je vous avais entretenus de la première femme sénateur, Cairine Wilson. Cet après-midi, je voudrais attirer votre attention sur une femme du nom de Louise McKinney, l'une des premières femmes dans l'histoire du Canada à avoir été députées d'une assemblée législative, dans son cas celle de l'Alberta.

Louise McKinney avait toujours voulu devenir médecin. Cependant, elle était née en Ontario, et au XIXe siècle, en Ontario - et en fait, au Canada - les femmes n'avaient pas la possibilité de devenir médecins. Au lieu de cela, elle est devenue enseignante. Comme le font souvent les femmes, elle a fait contre mauvaise fortune bon coeur et s'est vu confier son premier poste d'enseignante à Drayton, au Dakota du Nord, à l'âge de 18 ans. À 26 ans, elle a commencé ce qu'elle considérait comme l'9uvre de sa vie. Elle est devenue organisatrice rémunérée pour la Women's Christian Temperance Union (Union chrétienne des femmes abstinentes) ou WCTU.

La WCTU était une importante source d'activité politique et sociale. Les membres se limitaient rarement aux seules activités liées à l'abstinence. De nombreuses suffragettes et féministes des premiers temps militaient au sein de cette organisation. De nombreuses femmes y ont été attirées à cause des conséquences de l'alcoolisme sur les femmes et les enfants, puis elles y sont restées parce que l'organisation s'intéressait également aux questions plus générales de l'égalité des femmes et des enfants.

En 1903, Louise McKinney est revenue vivre au Canada avec son époux. Ils se sont installés à Claresholm, juste au sud de Calgary. Poursuivant son travail auprès de la WCTU, elle est devenue très connue au sein de sa communauté, ayant acquis une grande notoriété pour son travail en faveur de la promotion du droit de vote des femmes et de l'abstinence.

En 1915, elle a mené la lutte en faveur d'un référendum sur la prohibition en Alberta. Les partisans de la prohibition ont obtenu gain de cause, mais cette mesure n'a jamais été appliquée. Louise McKinney en a été tellement consternée qu'elle a décidé d'être candidate aux élections, les femmes ayant obtenu le droit de vote en Alberta en 1917. Elle a mené une campagne non partisane sur le thème de la prohibition et a été élue.

Durant son mandat, Louise McKinney ne s'est pas intéressée qu'à la prohibition. Elle s'est occupée activement de santé publique et c'est elle qui est à l'origine de la création d'établissements pour les handicapés mentaux. Elle a également pris position en faveur d'une amélioration des conditions de travail des mineurs qui travaillaient dans les mines de charbon en Alberta. Elle a contribué à l'adoption de lois visant à venir en aide aux nouveaux immigrants, en particulier dans le domaine de la formation linguistique. Louise McKinney a aussi contribué activement à l'établissement des Cultivateurs unis de l'Alberta, organisme qui avait pour mission d'améliorer la condition des agriculteurs et de leurs familles.

S'intéressant tout particulièrement à la situation des femmes, Louise McKinney a joué un rôle de premier plan dans l'adoption de la loi dite Dower Act et de ses modifications ultérieures qui accordaient aux veuves et femmes séparées une meilleure situation au regard de la loi. Elle a critiqué le gouvernement pour les piètres pensions accordées aux mères. Elle a été défaite aux élections de 1921 par 46 voix, mais cela n'a pas mis fin à sa carrière politique. Elle s'est jointe à Emily Murphy et est devenue l'une des «Famous Five» du procès plus tard connu sous le nom de l'affaire «personne».

Louise McKinney était vue par de nombreuses personnes comme le meilleur débatteur et le meilleur orateur de l'Assemblée législative de l'Alberta. Forte de son expérience au sein de la WCTU, elle était une spécialiste de la procédure parlementaire. Elle a été un porte-parole efficace des femmes et des enfants.

 

Le Sénat

Les déclarations potentiellement diffamatoires faites par des députés du Parti réformiste-Le dépôt d'une demande introductive d'instance

L'honorable Ron Ghitter: Honorables sénateurs, aujourd'hui, à Calgary, mes avocats ont déposé une demande introductive d'instance alléguant que j'ai été diffamé par un député réformiste et par un employé du cabinet de Preston Manning, ainsi que par le Fonds des réformistes du Canada. L'objet de ma plainte est une lettre de sollicitation datée de septembre 1998 et distribuée à 31 000 ménages de l'Alberta. Elle a été imprimée sur papier à en-tête du Parti réformiste de l'Alberta, signée par le député et rédigée par l'adjoint de M. Manning.

Je prends la parole au Sénat pour parler publiquement et pour la première fois de cette affaire. Je ne le fais pas parce que je désire bénéficier de l'immunité offerte aux sénateurs qui s'expriment dans cette Chambre, car je répéterai ailleurs les propos que je tiens ici aujourd'hui. Je le fais parce que le procès que j'intente rejaillit sur le Sénat du Canada et sur ses membres, que je tiens en haute estime.

Par conséquent, avant que je ne prenne la parole ailleurs, je préfère expliquer à mes collègues ici présents les motifs qui me poussent à intenter ce procès. Je n'ai pas l'intention d'aborder le bien-fondé de cette plainte. Cet endroit ne se prête pas à des observations de ce genre. Cette tâche revient aux avocats et aux tribunaux, et j'ai entièrement confiance dans l'équité et la sagacité de notre système judiciaire.

Je puis vous assurer que j'intente ce procès sans enthousiasme ni bonheur, mais je l'ai fait sans hésitation. Je l'ai fait parce qu'il s'agit de la seule voie de recours possible et parce que ne rien faire équivaudrait à accepter les allégations contenues dans la lettre et à encourager le recours à des tactiques politiques qui sont répugnantes et inacceptables dans la vie politique au Canada.

J'ai intenté ce procès pour d'autres raisons également. L'une d'elles, de toute évidence, est pour défendre le nom de ma famille ainsi que ma réputation, que je me suis employé à bâtir en tant que bénévole actif et fonctionnaire. Je l'ai fait aussi parce que les défendeurs, après qu'on leur eut aimablement demandé de présenter des excuses, ont refusé de le faire et ont continué de tenir des propos diffamatoires devant la presse.

J'ai intenté ce procès parce de nombreux commentaires qui ont été faits à l'endroit du Sénat du Canada sont erronés et négligent de reconnaître les contributions utiles que fait notre institution pour préserver les fragiles édifices qui existent dans cette fédération qu'est le Canada.

Les questions en litige aujourd'hui, comme dans le procès intenté au printemps par le sénateur Lawson contre le Parti réformiste du Canada, portent sur des concepts de dignité très simples et très fondamentaux qui n'en demeurent pas moins essentiels pour que nos institutions démocratiques puissent survivre et prospérer, plus précisément la nécessité et la responsabilité pour les gens qui participent à la vie publique de maintenir un élément de décorum, de justice et, surtout, de courtoisie dans leur conduite.

Autrement dit, les gens qui, comme nous, ont une vie publique ont l'obligation de se pencher énergiquement sur ces points, de remettre en question les politiques adoptées par les autres, de se lancer dans les joutes oratoires du dialogue politique et de faire progresser nos programmes et nos débats de la façon la plus persuasive possible. Tout cela fait partie du milieu politique contemporain au Canada et ce sont des pratiques saines et acceptables. Toutefois, il est non seulement inacceptable, mais fort déplorable que l'on se livre à des tactiques de diffamation odieuses et mesquines fondées sur des faits erronés et des interprétations hors de contexte dans le but de favoriser les contributions politiques.

Si on n'y coupe pas court et qu'on les laisse devenir la norme au Canada, ces manoeuvres auxquelles ont recours des intervenants majeurs de la vie politique du Canada mineront inévitablement de plus en plus le respect qui est dû à nos institutions sur lesquelles reposent nos traditions démocratiques et à tous ces hommes et ces femmes dévoués qui choisissent de servir leurs concitoyens, que ce soit dans cette Chambre, à la Chambre des communes, dans les gouvernements provinciaux ou au sein des administrations municipales.

Il est juste et approprié de discuter du rôle du Sénat au sein de notre système parlementaire. Nous le faisons d'ailleurs nous-mêmes, notamment dans le cadre d'une interpellation que j'ai fait inscrire au Feuilleton. Il convient d'examiner notre Constitution pour voir s'il serait possible d'y apporter des modifications en vue de rendre cet endroit plus utile et acceptable pour les Canadiens.

Son Honneur le Président suppléant: Je regrette d'interrompre le sénateur, mais son temps de parole est écoulé. Êtes-vous d'accord, honorables sénateurs, pour l'autoriser à continuer?

Des voix: D'accord.

Le sénateur Ghitter: Il est légitime d'examiner notre Constitution afin de déterminer si l'on peut la modifier pour faire en sorte que cet endroit soit plus utile et qu'il soit mieux accepté par les Canadiens, tout comme il est légitime de préconiser l'élection des sénateurs, l'abolition du Sénat, la réduction des pouvoirs conférés au cabinet du premier ministre ou une transparence accrue de notre système politique. Il est par contre injuste et inopportun de laisser quiconque tourner en ridicule nos institutions parlementaires, nos tribunaux et ceux qui en font partie, simplement pour se faire du capital politique ou pour solliciter des dons.

Cette américanisation de nos pratiques politiques ne servira qu'à dévaloriser nos institutions démocratiques et à miner leur capacité de fonctionnement. Elle alimente le cynisme, le négativisme et le mépris à l'égard de notre Parlement, de nos tribunaux et de ceux qui en font partie. Elle découragera simplement de le faire les Canadiens compétents, instruits et dotés d'un bon jugement qui pourraient aspirer à une carrière publique - ce qui constitue un problème grave, à mon avis, comme peut en témoigner tout sénateur qui a déjà tenté d'encourager quelqu'un à accepter une charge publique. Pourquoi se porter candidat ou accepter une nomination à cet endroit si c'est seulement pour faire face à la méfiance, à l'irrespect, voire à de nombreuses attaques personnelles lancées par des gens en quête de capital politique? À cause de cela, un nombre croissant de Canadiens se désintéresseront de la politique et deviendront de plus en plus indifférents à ce qui se passe dans les principales villes de notre pays.

Lors des élections fédérales de 1993, 70 p. 100 des personnes ayant le droit de vote se sont prévalues de celui-ci. En juin 1997, ce pourcentage a chuté à 67 p. 100 à l'échelle nationale, et à seulement 59 p. 100 en Alberta. On a pu constater des tendances similaires - même hier, dans ma province - lors des élections provinciales et municipales. Le faible taux de participation de ceux qui peuvent exercer leur droit de vote pour la première fois au Canada est encore plus alarmant.

Évidemment, même s'il y a de nombreux facteurs pouvant expliquer cette indifférence croissante et le peu d'intérêt que semble susciter notre système politique, ils méritent d'être signalés. Le manque de courtoisie est l'un d'eux. N'oublions pas que c'est le Parti réformiste qui a promis de rétablir la courtoisie dans la politique canadienne. Le chef du Parti réformiste du Canada a fait les déclarations suivantes:

Nous allons faire campagne en défendant des principes et des idées précises et nous allons éviter de dénigrer gratuitement nos adversaires et de manipuler les symboles.

À une autre occasion, M. Manning a déclaré ceci:

Je veux aussi souligner que nous, du Parti réformiste, rejetons les attaques personnelles à l'égard d'individus ou les campagnes de dénigrement contre un groupe ou une région du Canada.

Comme il est dommage que les réformistes n'aient pas prêché par l'exemple. Comme il est dommage que leur parti politique en soit maintenant réduit à lancer des insultes et des calomnies.

J'ai appris, en tant qu'avocat plaignant, que vous devez devant la cour défendre votre client le mieux possible, tout en manifestant le plus grand respect envers le tribunal et l'avocat adverse. Une fois le procès terminé, vous félicitez l'autre avocat, vous allez peut-être même prendre un café avec lui, mais jamais vous ne dénigrez ou ne ridiculisez son travail et son dévouement envers son client.

En politique, où la lutte se fait vive et dure, où les orateurs s'enflamment et les discours se font flamboyants, les concepts d'équité et de respect doivent toujours sous-tendre les débats honnêtes et substantiels et la volonté d'améliorer le régime parlementaire.

Il arrive parfois au Sénat et à l'autre endroit que les divergences d'opinion sur des questions de principe soient énormes et que les désaccords soient aussi profonds que le pire des gouffres. Toutefois, pendant et après le débat, nous respectons, du moins je l'espère, nos collègues, ainsi que les devoirs et les responsabilités qui nous incombent.

Il ne faut jamais confondre la liberté d'expression avec la diffamation et la calomnie. Il ne faut jamais interpréter les divergences d'opinions comme des messages pleins d'amertume et de haine. Le pouvoir et l'influence politique ne doivent jamais servir d'armes pour miner nos institutions politiques fondamentales et mener, à des fins politiques, des attaques personnelles contre ceux qui servent ces institutions.

Nous devons tous, peu importent nos allégeances politiques, unir nos efforts pour solidifier le respect et l'estime dont doivent jouir nos institutions politiques et nos processus politiques. Nous devons unir nos efforts pour surmonter le cynisme et l'apathie dont nous sommes si souvent témoins au Canada de nos jours. Si nous n'y parvenons pas, nous serons tous perdants.

 

L'Alberta

Les résultats du référendum sur les sénateurs élus tenu durant les élections

L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, j'interviens aujourd'hui pour vous faire part de certains détails intéressants en ce qui concerne un scrutin tenu en Alberta pour choisir des candidats au Sénat.

Selon le chroniqueur chargé des affaires provinciales du Journal d'Edmonton, on estime que plus de la moitié des électeurs de cette ville ont refusé hier de voter lorsqu'on leur a demandé de choisir leur candidat. Je voudrais dire comment j'interprète cette réaction des électeurs.

Même si les électeurs de l'Alberta jugent importante une réforme du Sénat, je crois, à l'instar du chroniqueur du Journal d'Edmonton, que les Albertains ne veulent pas violer la Constitution canadienne. Cela rappelle à tous les Canadiens que le programme du Parti réformiste et son très grand mépris pour la Constitution sont inacceptables.

Je félicite les Albertains d'avoir respecté notre Constitution et peut-être que le chef de l'opposition de l'autre endroit prendra note de cela.

 

Les affaires étrangères

La commémoration du quarante-cinquième anniversaire du cessez-le-feu de la guerre de Corée

L'honorable Norman K. Atkins: Honorables sénateurs, le sénateur Johnstone et moi-même revenons d'un voyage au Japon et en Corée du Sud que nous avons fait avec un certain nombre d'anciens combattants de la guerre de Corée pour marquer le quarante-cinquième anniversaire du cessez-le-feu qui a mis fin à la guerre de Corée. Durant ce voyage, nous avons eu l'occasion de visiter un grand nombre de lieux commémoratifs et d'assister à un certain nombre de cérémonies émouvantes à Brampton, Vancouver, Esquimalt, Yokohama, Séoul, P'anmunjom, Kap'yong, Naechon et Pusan.

La Corée du Sud est un pays en développement avec une population de 45 millions d'habitants. Il y a des travaux de construction pratiquement partout. Les Coréens ont un système de réseau de transport tout à fait remarquable, compte tenu du fait qu'il se résumait à pratiquement à rien il y a 45 ans. Leur économie a progressé et cela se voit partout dans le pays.

J'ai été particulièrement touché par les chaleureux sentiments exprimés par les Coréens du Sud à l'égard des anciens combattants canadiens de la guerre de Corée en reconnaissance, c'est évident, de la participation canadienne à la guerre de Corée.

Il y a eu des moments très émouvants, mais plusieurs événements auxquels nous avons assisté sont vraiment ressortis du lot: le rapatriement de cinq corps non identifiés qui ont été transférés par la Corée du Nord au commandement des Nations Unies à P'anmunjom; le service donné à Kap'yong, où le régiment PPCLI s'est distingué au combat, et notre visite au cimetière commémoratif des Nations Unies à Pusan, où 376 Canadiens sont enterrés.

Certains remettent en question la valeur de ces pèlerinages. À la suite de mon expérience récente, je suis persuadé que c'est un élément très important du mandat du ministère des Anciens combattants. Grâce à ce genre de voyage, nous établissons et maintenons des relations importantes dans les pays étrangers où des Canadiens ont combattu et sont morts avec honneur.

Dans le cas de la Corée du Sud, les Canadiens ont, c'est évident, fait leur marque et cela a rendu très fiers ceux d'entre nous qui ont accompagné les anciens combattants de la guerre de Corée. Cela a été un honneur pour moi, et je pense parler également au nom du sénateur Johnstone lorsque je dis que ces deux dernières semaines de pèlerinage ont été tout à fait mémorables. Le fait d'être les représentants du Sénat canadien était pour nous un grand privilège.

 

Le Nouveau-Brunswick

Des félicitations au chef du Parti conservateur pour son élection

L'honorable Mabel M. DeWare: Honorables sénateurs, à l'ouverture de la prochaine session à l'Assemblée législative du Nouveau-Brunswick, le chef du Parti conservateur occupera le siège qui lui revient. En effet, par suite des trois élections partielles tenues hier dans la province, le chef de notre parti a remporté la victoire dans la circonscription de Moncton-Est et notre parti a gagné l'élection dans Fredericton-Sud. Le Parti libéral représentait la circonscription de Moncton-Est depuis 24 ans. Félicitations au chef du Parti conservateur du Nouveau-Brunswick qui la représente désormais.

Je félicite également tous les électeurs du Nouveau-Brunswick qui ont décidé de se prononcer de la manière qui convenait le mieux hier.

[Français]

 

Visiteurs de marque

Son Honneur le Président suppléant: Honorables sénateurs, j'attire votre attention sur la présence à notre tribune des membres de la sous-commission des relations économiques de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe. Je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

 


[Traduction]

AFFAIRES COURANTES

Projet de loi sur l'Agence Parcs Canada

Rapport du comité

L'honorable Ron Ghitter, président du comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles, présente le rapport suivant:

Le mardi 20 octobre 1998

Le comité sénatorial permanent de l'énergie, de l'environnement et des ressources naturelles a l'honneur de présenter son

QUATRIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été déféré le projet de loi C-29, Loi portant création de l'Agence Parcs Canada et apportant des modifications corrélatives à certaines lois, a, conformément à l'ordre de renvoi du lundi 15 juin 1998, étudié ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement mais avec les observations suivantes:

Pendant l'étude du projet de loi C-29, le comité a entendu un certain nombre de recommandations de témoins qui, à son avis, méritent d'être étudiées par le ministre. Les voici:

 

(1) Étoffer le préambule du projet de loi pour faire ressortir le mandat de conservation de l'Agence. La formulation suivante a été proposée:
d'assurer la conservation des écosystèmes et des aires naturelles s'étendant au-delà des limites des parcs nationaux en collaborant avec les propriétaires des terres adjacentes et en s'associant aux recherches, aux évaluations environnementales et aux activités de planification menées dans la région;
(2) Ajouter un énoncé du but global de l'Agence pour affermir la portée de la loi. La formulation suivante a été proposée:
l'Agence a pour mandat de protéger les exemples significatifs - du point de vue national - du patrimoine naturel et culturel du Canada dans les parcs nationaux, les lieux historiques nationaux, les aires marines de conservation et les lieux patrimoniaux connexes et de mettre en valeur ces lieux de façon à favoriser leur intégrité écologique et commémorative à long terme;
(3) Mettre sur pied, par l'entremise du ministre du Patrimoine canadien, un conseil consultatif national constitué d'intervenants bien informés. Le conseil se réunirait une fois tous les trois mois avec la Direction de l'Agence canadienne des parcs;
(4) Prévoir dans la loi que la population doit participer à l'élaboration ou à la modification du plan directeur de l'Agence.
Respectueusement soumis,

Le président,
RONALD D. GHITTER

Son Honneur le Président suppléant: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Fitzpatrick, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour de la prochaine séance.)

 

Les travaux du Sénat

L'ajournement

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, avec la permission du Sénat et nonobstant l'alinéa 58(1)h) du Règlement, je propose:

Que, lorsque le Sénat s'ajournera aujourd'hui, il demeure ajourné jusqu'à demain, le mercredi 21 octobre 1998, à 13 h 30.

Son Honneur le Président suppléant: La permission est-elle accordée, honorables sénateurs?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

 

Projet de loi de mise en oeuvre du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires

Première lecture

Son Honneur le Président suppléant annonce qu'il a reçu des Communes un message accompagné du projet de loi C-52, Loi portant mise en oeuvre du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires.

(Le projet de loi est lu une première fois.)

Son Honneur le Président suppléant: Honorables sénateurs, quand lirons-nous ce projet de loi une deuxième fois?

(Sur la motion du sénateur Carstairs, la deuxième lecture du projet de loi est inscrite à l'ordre du jour du jeudi 22 octobre 1998.)

 

Bibliothèque du Parlement
Langues officielles
Examen de la réglementation

Les comités mixtes permanents-Message des Communes

Son Honneur le Président suppléant informe le Sénat qu'il a reçu de la Chambre des communes le message suivant:

Il est ordonné, - Que les comités mixtes permanents de la Chambre soient composés des députés dont les noms figurent ci-après:

Bibliothèque du Parlement

Membres: Bailey, Catterall, Clouthier, Finlay, Grey (Edmonton-Nord), Karygiannis, Lavigne, Lill, Malhi, Mayfield, Mercier, Plamondon, Price, Redman, Saada et St. Denis - (16)
Membres associés: Davies et Dumas

Langues officielles

Membres: Bélanger, Bellemare, Bradshaw, Coderre, Finestone, Goldring, Kilger, Mark, McTeague, McWhinney, Meredith, Muise, Paradis, Plamondon, Tremblay (Rimouski-Mitis) et Vautour - (16) Membres associés: Brien, Dumas, Godin et Nystrom
Membres associés: Davies et Dumas

Examen de la réglementation

Membres: Bailey, Bryden, Casey, DeVillers, Epp, Gouk, Grewal, Jennings, Lebel, Lee, Malhi, Maloney, Murray, Nystrom, Saada, Venne et Wappel - (17)
Membres associés: Axworthy (Saskatoon-Rosetown-Biggar), Bellehumeur, Guimond et Marceau
Qu'un message soit transmis au Sénat afin d'informer les honorables sénateurs des noms des députés qui représenteront la Chambre aux comités mixtes permanents.

ATTESTÉ:

Le greffier de la Chambre des communes,
ROBERT MARLEAU

[Français]

L'Association parlementaire canadienne de l'OTAN

Dépôt du rapport de la délégation canadienne à la Session de printemps de l'Assemblée de l'Atlantique Nord, tenue à Barcelone, en Espagne

L'honorable Shirley Maheu: Honorables sénateurs, j'ai l'honneur de déposer le cinquième rapport de l'Association parlementaire canadienne de l'OTAN. Il s'agit du rapport de la délégation officielle qui a représenté le Canada à la session de printemps 1998 de l'Assemblée de l'Atlantique Nord (Parlementaires de l'OTAN) tenue à Barcelone, en Espagne, du 22 au 26 mai 1998.

[Traduction]

Le solliciteur général

La Commission d'enquête sur le traitement réservé par la GRC aux protestataires à la conférence de l'APEC-La mise à la disposition des étudiants des fonds pour leur défense-Avis de motion

L'honorable Pat Carney: Honorables sénateurs, je donne avis que, jeudi prochain, le 22 octobre, je proposerai:

Que le Sénat appuie une allocation de fonds de défense juridique aux plaignants qui se présenteront aux audiences de la Commission des plaintes du public contre la GRC à Vancouver relativement à la conférence de l'APEC.

 

La Déclaration universelle des droits de l'homme

La commémoration du cinquantenaire-Avis d'interpellation

L'honorable Lois Wilson: Honorables sénateurs, je donne avis que, jeudi prochain, le 22 octobre, j'attirerai l'attention du Sénat sur le cinquantenaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme et sur la signification de cet événement pour le Canada.

 

L'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe

Le Séminaire parlementaire sur le règlement des conflits et le développement démocratique dans le Caucase tenu à Tbilissi, en République de Géorgie-Avis d'interpellation

L'honorable Jerahmiel S. Grafstein: Honorables sénateurs, je donne avis que, jeudi prochain, le 22 octobre, j'attirerai l'attention du Sénat sur le séminaire parlementaire sur le règlement des conflits et le développement démocratique dans le Caucase tenu à Tbilissi, en République de Géorgie, du 3 au 6 octobre 1998.

PÉRIODE DES QUESTIONS

Le solliciteur général

La Commission d'enquête sur le traitement réservé aux protestataires par la GRC lors de la conférence de l'APEC-L'octroi de fonds pour la défense des étudiants-Le réexamen de la question

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Honorables sénateurs, jeudi dernier, j'ai eu l'occasion de rencontrer le solliciteur général avec des experts des questions de droits de la personne de tout le Canada. Des experts des droits de la personne comme Alan Borovoy, de l'Association canadienne des libertés civiles, et Warren Allmand, président du Centre international des droits de la personne et du développement démocratique et ancien solliciteur général, ont exhorté le solliciteur général à prendre une décision ministérielle et à accorder des fonds aux étudiants qui comparaissent devant la Commission des plaintes du public contre la GRC. Dans un communiqué reçu vendredi, nous avons appris que le solliciteur général avait déclaré que le gouvernement refusait.

Je demande au leader du gouvernement s'il peut dire au Sénat qui, au sein du gouvernement, le solliciteur général aurait consulté pour pouvoir dire que «le gouvernement a étudié la question». Est-ce qu'il s'agit en l'occurrence des «forces du mal» au sein du cabinet du premier ministre, de quelqu'un d'autre au sein de ce cabinet ou du premier ministre lui-même?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, le sénateur Kinsella devrait savoir que le solliciteur général a très soigneusement étudié les recommandations des membres de l'éminent groupe qui étaient présents à la réunion jeudi.

Le lendemain, après mûre réflexion, le solliciteur général a écrit à Gerald Morin, président du groupe spécial de la Commission des plaintes du public contre la GRC. Je n'ai pas l'intention de vous lire la lettre intégralement, mais je me ferai un plaisir de la déposer si le sénateur Kinsella et d'autres sénateurs y tiennent. Il dit toutefois dans sa lettre que celle-ci a pour but de leur faire savoir que le gouvernement a soigneusement examiné la question et décidé de maintenir sa décision de ne pas payer les honoraires d'avocat des plaignants dont il avait fait part dans sa lettre du 31 août 1998.

L'auteur de la lettre dit en outre que le gouvernement est d'accord avec M. Morin, qui fait remarquer dans sa lettre au ministre Scott que toutes les parties qui comparaissent devant le groupe devraient être traitées avec dignité et équité.

M. Scott a précisé que le gouvernement est d'avis que le groupe spécial pourrait examiner toutes les plaintes dont il est saisi de façon transparente et approfondie, sans que le gouvernement aient à payer les honoraires d'avocat des plaignants.

Il fait remarquer que, suite à la demande de la commission, le gouvernement a mis récemment à la disposition de la commission des plaintes 650 000 $ de plus pour financer le groupe spécial et qu'il continuera de donner à la commission les moyens nécessaires pour mener à bien son enquête.

M. Scott conclut que, pour les raisons susmentionnées, le gouvernement pense que les Canadiens font confiance au groupe spécial et qu'il attend les conclusions et les recommandations.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, nous apprécierions que cette lettre soit déposée. Nous pourrions peut-être aussi obtenir le dépôt de la lettre que M. Morin a écrite au solliciteur général.

Les honorables sénateurs trouveront intéressant d'apprendre que la lettre comporte six paragraphes et que, dans ces six paragraphes, on trouve les mots «le gouvernement croit», «le gouvernement a considéré», «le gouvernement prévoit» et «le gouvernement est d'avis». La Commission des plaintes du public contre la GRC a adressé la demande au solliciteur général pour lui demander de prendre une décision. En six paragraphes, la lettre comporte huit références à la position du gouvernement.

Voici ma question au leader du gouvernement au Sénat: n'y a-t-il pas une nette distinction entre, d'une part, la responsabilité du solliciteur général et, d'autre part, la responsabilité du gouvernement? Dans ce cas précis, le gouvernement a fait valoir qu'il revenait à la Commission des plaintes du public contre la GRC de faire une enquête poussée sur ces prétendues violations des droits de la personne, mais il a dit ensuite qu'il n'offrirait aucune aide financière pour la réalisation de l'enquête, aide qu'il aurait normalement fournie pour une enquête menée en vertu de la Loi sur les enquêtes.

Le ministre pourrait peut-être nous expliquer autre chose. Le gouvernement est cointimé dans cette cause dont est saisie la commission de police. Le solliciteur général le mentionne huit fois dans sa lettre. Comment le gouvernement peut-il être cointimé et déterminer si oui ou non, les victimes ou les plaignants bénéficieront d'une aide juridique?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, différents ministres ont différents styles. Le ministre Scott a, de toute évidence, choisi d'utiliser le «nous» plutôt que le «je», mais il a toujours parlé au nom du gouvernement dans l'ensemble. En tant que solliciteur général, il est le ministre responsable de cette enquête. Il est le porte-parole du gouvernement, et l'on peut présumer que c'est pour cette raison qu'il a répondu au nom du gouvernement.

Le sénateur Kinsella: Honorables sénateurs, est-ce que l'honorable ministre prétend que le solliciteur général ne possède pas un pouvoir quasi judiciaire selon notre régime parlementaire et qu'en l'occurrence nous nous trouvons devant une demande qui, aux termes des lois du Parlement, revient à assigner un pouvoir quasi judiciaire au solliciteur général, ce qui est en contradiction avec son rôle de membre du Cabinet?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, comme je l'ai dit, le solliciteur général a répondu dans ce cas précis au nom de l'ensemble du gouvernement.

 

La commission d'enquête sur le traitement réservé par la GRC aux manifestants lors de la conférence de l'APEC-La possibilité d'une enquête publique- La position du gouvernement

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Ma dernière question complémentaire, honorables sénateurs, est la suivante: étant donné que le public a maintenant perdu confiance dans la capacité de la Commission des plaintes du public contre la GRC de bien s'acquitter de son mandat, le leader du gouvernement dira-t-il au Sénat si, oui ou non, son gouvernement va entreprendre tout de suite une enquête prévue par la Loi sur les enquêtes dans les cas de violation des droits de la personne qui se seraient produits lors de la conférence de l'APEC?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, contrairement à mon honorable collègue, je crois que les Canadiens ont encore toute confiance dans la Commission des plaintes du public. Si mon honorable collègue voulait bien se pencher sur le bilan de la Commission des plaintes du public, il constaterait sa bonne réputation non seulement au Canada, mais dans le monde entier. Il ne convient pas de pousser l'affaire plus avant en réclamant une enquête publique, alors qu'il existe une commission chargée d'instruire cette affaire.

 

La commission d'enquête sur le traitement réservé par la GRC aux manifestants lors de la conférence de l'APEC-L'allocation de fonds à la défense des étudiants-La position du gouvernement

L'honorable Pat Carney: Honorables sénateurs, ma question s'adresse également au leader du gouvernement au Sénat.

Le directeur exécutif de la Commission des plaintes du public contre la GRC a dit que le budget pour les audiences au sujet de l'APEC avait été fixé à 1 million de dollars environ, ce qui en ferait la plus coûteuse dans l'histoire du Canada. Sur quoi s'est-on basé pour faire cette estimation? Quel pourcentage servira à payer pour la défense du gouvernement et quel pourcentage à payer pour la défense de la GRC?

Je me doute bien que mon collègue n'a pas ces renseignements sous la main, mais je lui demanderais de les déposer au Sénat dès que possible.

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je serai très heureux de répondre à la demande de ma collègue. Il semble que le gouvernement ait fourni, comme je viens de le mentionner, quelque 650 000 dollars. La Commission des plaintes du public a son propre budget. Je suppose que la commission aura besoin de plus d'argent pour continuer son travail et le gouvernement est bien prêt à répondre favorablement à une demande de fonds supplémentaires.

Le sénateur Carney: Honorables sénateurs, de toute évidence, le gouvernement va répondre favorablement à une demande de fonds pour payer les avocats du gouvernement, mais la question est le financement des étudiants.

Récemment, une femme a écrit au Times Colonist de Victoria pour dire que les meurtriers, les violeurs et autres brigands avaient droit à un avocat s'ils avaient à comparaître devant une commission ou un tribunal. Étant donné que le gouvernement se propose d'utiliser l'argent de nos impôts pour se défendre, comment se fait-il qu'il refuse de payer pour défendre les droits des étudiants? Est-ce que ce sont des droits que l'on peut violer comme on a violé les droits de la personne à l'occasion de l'incident du gaz poivré?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, il importe de reconnaître qu'en vertu de nos règles de procédure, tous les fonctionnaires dans l'exercice de leurs fonctions qui font l'objet d'un enquête de ce genre, et cela inclut les membres de la Gendarmerie royale du Canada, ont droit à une assistance judiciaire. Ce ne sont pas des plaignants, mais bien des accusés. Dans ce cas précis, et je suis persuadé qu'il y a bon nombre de précédents pour justifier la décision du gouvernement dans cette affaire, les plaignants n'ont pas droit à une aide financière. On ne fournit pas d'avocats aux plaignants.

Il est bien sûr que le gouvernement sait qu'il a des comptes à rendre aux contribuables. Si on acceptait d'accorder des fonds dans ce cas en particulier, où cela nous mènerait-il? Quels genres de précédents créerait-on? C'est la décision qui a été prise.

Maintenant que les choses se sont un peu calmées, il serait bon que l'on examine un peu l'évolution des travaux de la commission dans les jours et les semaines à venir.

 

Les propos du ministre relativement au dispositif de sécurité prévu pour la Conférence de 1999 de la Francophonie qui se tiendra à Moncton, au Nouveau-Brunswick-La position du gouvernement

L'honorable Brenda M. Robertson: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat.

On apprend dans l'édition du 11 septembre 1998 du Times-Transcript de Moncton, et je déposerai ce document plus tard, que le solliciteur général a fait des commentaires sur les mesures de sécurité qui seront prises pour le Sommet de la Francophonie qui se tiendra à Moncton en septembre 1999. Certains de ces commentaires inquiètent grandement les habitants du Nouveau-Brunswick, et en particulier ceux de Moncton. Selon le Times-Transcript:

Le solliciteur général Andy Scott a fait savoir au Times-Transcript que si elles sont avalisées par la Commission des plaintes du public contre la GRC, les mesures adoptées pour maîtriser les étudiants de l'Université de la Colombie-Britannique au cours de la rencontre des dirigeants des pays du Pacifique tenue à Vancouver en novembre dernier seraient justifiées dans des circonstances analogues.

Est-ce que cela signifie que le Sommet de la Francophonie risque d'être la scène du même genre de conflit qui a entraîné l'utilisation du poivre de Cayenne et de la force par la GRC?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, j'espère sincèrement que tel ne sera pas le cas. On a tiré de nombreuses leçons du sommet de l'APEC qui a eu lieu en Colombie-Britannique. L'une des premières concerne l'emplacement choisi.

Je sais que l'ancien secrétaire général des Nations Unies, qui est maintenant secrétaire général de la Francophonie, s'est rendu à Moncton où il s'est entretenu avec les responsables de l'organisation du Sommet de la Francophonie de 1999. Je suis certain que le secrétaire général et toutes les personnes concernées prendront les précautions nécessaires pour éviter une répétition de ce genre d'incidents, sans pour autant empêcher les Canadiens de manifester de manière pacifique si tel est leur choix.

 

Les lignes directrices pour le dispositif de sécurité pour la conférence de la Francophonie à Moncton, au Nouveau-Brunswick-Demande de précisions

L'honorable Brenda M. Robertson: Honorables sénateurs, je ne trouve pas cela très réconfortant.

Honorables sénateurs, nous savons que les Américains et les Indonésiens ont été autorisés à entrer au Canada avec des armes à feu, dans le cas des Américains, lors du sommet Clinton-Chrétien, et dans le cas des Indonésiens, lors du sommet de l'APEC. J'aimerais savoir quelles lignes directrices seront en vigueur pendant le Sommet de la Francophonie, particulièrement en ce qui concerne le port d'armes.

Avant que le leader réponde à ma question, j'aimerais lire un autre passage de cet intéressant article.

Voici ce qui va se passer à Moncton:

En septembre 1999, Moncton recevra les dirigeants de 49 pays du monde. Les États membres comprennent le Togo, qui est dirigé par un dictateur détenant le record de longévité en Afrique, et des points chauds comme le Rwanda, le Burundi, le Congo et Haïti, où les droits de la personne sont constamment bafoués. En comparaison, seuls 15 pays ont participé l'an dernier au sommet de la coopération économique Asie-Pacifique.

Je répète ma question: quelles lignes directrices suivra-t-on concernant le port d'armes au Sommet de la Francophonie?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, je remercie le sénateur de nous avoir signalé cette affaire, car il y a bien des leçons à tirer des incidents passés. La ville de Moncton et le Nouveau-Brunswick méritent des félicitations pour avoir été choisis pour la tenue de la très importante conférence de la Francophonie, à laquelle participeront les représentants de 49 pays, si tous sont au rendez-vous.

Au sommet de l'APEC, à Vancouver, 17 pays étaient membres de l'organisation. Je crois que celle-ci en compte aujourd'hui 21.

Il a été révélé que ceux qui sont venus pour assurer la protection du président des États-Unis, par exemple, ou d'autres chefs d'État portaient des armes. Je crois que ces gens ont reçu provisoirement le statut d'agent de la paix et ont été enregistrés comme agents du gouvernement. C'était une façon légale de les autoriser à porter des armes. Un accord de réciprocité a été conclu permettant aux membres de la GRC qui accompagnent le premier ministre du Canada de porter des armes à l'étranger également.

En ce qui concerne les lignes directrices, je tiens à rassurer le sénateur: nous avons su tirer des leçons du passé. J'espère que nous saurons les mettre à profit à l'avenir. Que je sache, les lignes directrices n'ont pas été définitivement établies. Elles feront certainement l'objet d'un examen attentif. Je suis persuadé que la Gendarmerie royale du Canada, de concert avec d'autres organismes compétents et après consultation des représentants d'autres pays, veillera à ce que toutes les précautions soient prises pour protéger non seulement les invités qui viennent participer au sommet, mais aussi les citoyens canadiens.

Je remercie le sénateur d'avoir signalé cette affaire au Sénat. Je dois aussi reconnaître que chaque pays hôte a la responsabilité de la protection et de la sécurité de quiconque vient de l'étranger participer à une conférence.

Le sénateur Robertson: Honorables sénateurs, tous les sénateurs et par la plupart des Canadiens reconnaissent tout à fait ces responsabilités.

Ce que les habitants du Nouveau-Brunswick veulent, et en particulier ceux de Moncton, c'est que personne, qu'il s'agisse de membres de la GRC ou de qui que ce soit d'autre, ne viole leurs droits. Le processus démocratique doit suivre son cours et les droits de la personne doivent être protégés.

Je vais attendre avec intérêt les réponses à ces questions par l'honorable leader du gouvernement.

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, l'honorable sénateur soulève une question tout à fait légitime. Je pourrais m'engager à ce stade-ci, au nom du gouvernement, à ce que les droits de la personne des habitants de Moncton soient protégés et respectés à tous égards.

 

La justice

La vente d'avions Airbus à Air Canada-Les allégations concernant des discussions du premier ministre-La position du gouvernement

L'honorable Marjory LeBreton: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Cela touche au coeur même d'un problème grave. Je me reporte à l'intolérance du premier ministre à l'égard de points de vue autres que le sien et à son mépris à l'égard de ses adversaires politiques, même ceux qui ont quitté la scène politique. Les conséquences de tout ceci sont très graves.

Voici ce qu'on peut lire à la page 303 du nouveau livre de William Kaplan intitulé: Presumed Guilty, passage qui a été repris dans le Ottawa Citizen du 2 octobre 1998:

 

[...] après s'être montré très envieux du style de vie de Brian Mulroney et de ses succès professionnels et financiers après avoir quitté le poste de premier ministre, M. Chrétien a confié à un important homme d'affaires d'Ottawa, qu'il connaît depuis des années, qu'il avait pensé à charger une commission royale de se pencher sur l'affaire Airbus, mais qu'il avait décidé de n'en rien faire.
C'est une révélation intéressante, étant donné que le premier ministre a déclaré le 20 novembre 1995, à Tokyo, qu'il n'avait jamais entendu parler de cette affaire avant qu'un article ne paraisse à ce sujet, le 18 novembre 1995, dans le Financial Post.

Le leader du gouvernement va-t-il confirmer que le premier ministre a, en fait, confié à un homme d'affaires d'Ottawa, à l'été de 1995, qu'il avait songé à créer une commission royale d'enquête sur l'affaire Airbus?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, comme l'honorable sénateur en est consciente, je pense qu'il est impossible pour moi d'être au courant des conversations privées que le premier ministre ou n'importe quel autre citoyen pourrait avoir eues. Il serait donc non seulement impossible pour moi de répondre, mais aussi inapproprié de ma part de faire des conjectures à ce sujet.

Le sénateur LeBreton: Honorables sénateurs, je pourrais peut-être simplement demander au leader du gouvernement de poser au premier ministre la question suivante: le premier ministre a-t-il discuté ouvertement de la vente d'Airbus à Air Canada et de la supposée intervention d'un ex-premier ministre avant même que la lettre datant du mois de septembre 1995 ne soit envoyée au gouvernement suisse?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, j'informerai certainement le premier ministre des observations faites par l'honorable sénateur. Je ne puis dire cependant si je serai en mesure d'obtenir une réponse.

 

Les finances nationales

Les prévisions à long terme de la politique financière fondées sur les tendances démographiques-La position du vérificateur général-Demande de réponse

L'honorable Terry Stratton: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Je reviens à une question que j'ai posée le 16 juin 1998 au sujet du rapport du vérificateur général. Permettez-moi de citer quelques extraits de la question que j'ai posée ce jour-là. J'ai dit:

Il semble qu'un nouvel affrontement met aux prises le vérificateur général et le ministre des Finances, si on en croit le Financial Post d'aujourd'hui. Cette fois, M. Desautels veut que le ministère fournisse des prévisions financières à long terme sur les répercussions probables du vieillissement démographique sur la situation financière du gouvernement, parce que le fardeau sera énorme si la dette reste aussi lourde.

J'ai ajouté:

Par exemple, les États-Unis, la Grande-Bretagne, l'Australie et la Nouvelle-Zélande fournissent ce genre de renseignements sous une forme ou une autre. Le gouvernement travailliste de Grande-Bretagne a récemment adopté un code de stabilité financière, qui exige la présentation de prévisions sur au moins dix ans de l'incidence intergénérationnelle de la politique fiscale.

Si d'autres gouvernements le font à cause de l'incidence du vieillissement de la génération du baby-boom sur les finances du gouvernement, comment expliquer notre inaction à cet égard? La question hantera le leader pendant quelque temps encore.

Si je puis me permettre, honorables sénateurs, j'aimerais citer la réponse du leader du gouvernement afin de lui rafraîchir complètement la mémoire. Il a répondu:

Elle pourrait bien me hanter, honorables sénateurs. Cependant, je suis très heureux que le gouvernement du Canada ait entrepris à ce sujet des études à long terme qui seront rendues publiques dès qu'elles seront disponibles.

Cette information nous sera-t-elle communiquée bientôt?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, il reste à voir à long terme si je peux donner une brève réponse en un court laps de temps. Je vais certainement m'informer.

Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, j'ai reçu un appel téléphonique du bureau du leader du gouvernement avant la rentrée de septembre. On m'a dit que je recevrais cette information. Le leader du gouvernement est-il au courant de cet appel fait à mon bureau pour m'annoncer que je recevrais cette information?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je ne me tiens pas au courant de tous les appels qui sont reçus à mon bureau ou qui en émanent. J'ai demandé en effet à mes collaborateurs de vous tenir informé. Par conséquent, et puisque j'ai d'excellents collaborateurs, cet appel a été fait. Je ne pourrais pas dire exactement quel jour, à quel moment et par qui, mais je puis confirmer que j'avais demandé qu'on vous tienne informé.

Le sénateur Stratton: Honorables sénateurs, je suis plutôt curieux à ce sujet car, juste après qu'on m'ait appelé pour me dire que j'allais recevoir cette information, à condition de ne pas la déposer au Sénat - ce que j'ai accepté - l'actuaire du Régime de pensions du Canada a été congédié.

(1520)

Le sénateur Di Nino: C'est votre faute!

Le sénateur Stratton: C'est plutôt curieux. Je ne sais pas s'il y a un lien ou pas. On devait me faire parvenir cette information et puis, soudain, le silence.

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je me réjouis de voir que le sénateur Stratton est prêt à partager non seulement la célébrité, mais aussi la responsabilité.

 

Le solliciteur général

Les lignes directrices concernant le dispositif de sécurité pour les dignitaires étrangers en visite au Canada-La position du gouvernement

L'honorable Norman K. Atkins: Honorables sénateurs, ma question s'adresse au leader du gouvernement au Sénat. Elle fait suite à la question que le sénateur Robertson a posée au sujet de la présence de gardes du corps armés. Madame le sénateur a demandé quelles lignes directrices s'appliqueront dans le cas des dignitaires étrangers qui viendront au Canada à l'occasion du Sommet de la Francophonie en 1999.

Le gouvernement a-t-il pour politique d'autoriser les gardes du corps qui accompagnent les dirigeants étrangers en visite au Canada à porter des armes dans tous les cas?

L'honorable B. Alasdair Graham (leader du gouvernement): Honorables sénateurs, certainement pas dans tous les cas, mais le port d'armes peut être autorisé en vertu d'ententes préalables.

Le sénateur Atkins: Dans ce cas, la question est la suivante: quelles sont les lignes directrices actuelles qui autorisent le port d'armes?

Le sénateur Graham: Honorables sénateurs, je devrai obtenir une réponse plus détaillée. Les médias nous ont déjà appris que lorsque des ententes préalables sont conclues, les services de sécurité qui protègent le premier ministre et le Gouverneur général sont autorisés à porter des armes lorsque ces derniers effectuent des séjours à l'étranger. Des ententes de réciprocité ont été conclues à l'endroit du personnel de sécurité affecté à la protection des dirigeants étrangers qui viennent au Canada pour participer à des conférences spéciales. Je pense notamment au président des États-Unis, qui participait aussi à la conférence de l'APEC à Vancouver, au président de l'Indonésie, au président des Philippines ou de quelque autre pays. Ce sont là des cas plus récents, mais à mesure que se déroulera l'enquête de la Commission des plaintes et que cette dernière entendra les témoins, nous nous rendrons compte qu'il y a d'autres précédents. J'invite tous les honorables sénateurs à suivre de près les travaux de la commission. Ce sera sûrement très intéressant et très instructif.

 

Réponses différées à des questions orales

L'honorable Sharon Carstairs (leader adjoint du gouvernement): Honorables sénateurs, j'ai une réponse à la question posée au Sénat le 1er octobre 1998 par l'honorable sénateur Mira Spivak, concernant l'explosion sur la route près de Sudbury, en Ontario et la demande d'une enquête publique; une réponse à la question posée au Sénat le 23 septembre 1998 par l'honorable sénateur Pat Carney, concernant l'annulation du programme d'automatisation des phares et la disponibilité de fonds pour la sécurité nautique; et une réponse à la question posée au Sénat le 24 septembre 1998 par l'honorable sénateur Terry Stratton, concernant le traitement infligé par la GRC aux manifestants lors de la conférence de l'APEC et la détention d'un étudiant avant la conférence.

 

L'environnement

L'explosion sur la route près de Sudbury, en Ontario-Demande d'une enquête publique-La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable Mira Spivakle 1er octobre 1998)

La sécurité constitue la priorité de Transports Canada. Les fonctionnaires de Transports Canada et ceux de Ressources naturelles Canada continueront d'enquêter sur les causes de l'explosion, aidés des fonctionnaires provinciaux du ministère des Transports de l'Ontario et de la police provinciale de l'Ontario. Le rapport de cette enquête conjointe sera rendu public.

Ressources naturelles Canada, en vertu de la Loi sur les explosifs, ou Transports Canada, en vertu de la Loi de 1992 sur le transport des marchandises dangereuses, pourrait mener une enquête sur l'explosion. Cependant, ni l'un ni l'autre n'estime qu'une enquête pourrait apporter plus d'informations que celles obtenues lors du processus habituel. Par conséquent, les deux ministères ont décidé de mener une enquête conjointe sur les causes de la détonation et ses effets. Le ministre ontarien des Transports collaborera à l'enquête en ce qui a trait aux causes de cet accident de la circulation.

Bien qu'on puisse envisager de recourir à la Loi de 1992 sur le transport des marchandises dangereuses pour mettre sur pied une enquête, l'importance de celle-ci serait obligatoirement limitée par la portée de cette loi. Une équipe d'enquête conjointe a été mise sur pied afin d'y faire participer les quatre organismes visés (Transports Canada, Ressources naturelles Canada, le ministère des Transports de l'Ontario et la police provinciale de l'Ontario). Le rapport d'enquête comportera une indication des modifications éventuelles à apporter aux règlements.

Si les résultats de l'enquête indiquent que l'explosion s'est produite en dépit du respect des dispositions du Règlement et de la Loi de 1992 sur le transport des marchandises dangereuses, ainsi que du Règlement et de la Loi sur les explosifs, les règlements pris en vertu de l'une de ces lois, ou des deux, seront modifiés pour éviter qu'un tel accident ne se reproduise.

 

La Colombie-Britannique

L'annulation du programme d'automatisation des phares-La disponibilité de fonds pour la sécurité nautique-La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable Pat Carney le 23 septembre 1998)

Les phares de la côte Ouest sont entièrement automatisés depuis de nombreuses années. C'est pour cette raison que des hauts fonctionnaires de la Garde côtière ont proposé un moyen d'économiser des ressources en retirant les gardiens des 27 phares encore animés par du personnel.

En mars, le gouvernement a annoncé qu'il écouterait les résidants de la Colombie-Britannique qui ont exprimé avec éloquence la nécessité de laisser les gardiens de phare à leur poste. Nous avons expliqué clairement, à ce moment, qu'il n'y avait aucun problème de sécurité aux emplacements automatisés et que nous aurions pu automatiser entièrement une grande partie des autres phares sans compromettre la sécurité.

Des dépenses de 2,3 millions de dollars de la Garde côtière concernent des activités déjà commencées dans le cadre du projet de modernisation des phares, pour que des projets à contrat soient achevés et pour que les installations nécessaires aux gardiens de phare soient réaménagées. Le maintien des gardiens de phare à leur poste entraînera des dépenses supplémentaires importantes à ces emplacements.

Le solliciteur général

Le traitement infligé par la GRC aux manifestants lors de la conférence de l'APEC-La détention d'un étudiant avant la conférence-La position du gouvernement

(Réponse à la question posée par l'honorable Terry Strattonle 24 septembre 1998.)

La Commission des plaintes du public (CPP) contre la GRC est formée d'un président, d'un vice-président, d'un membre de chaque province ou territoire desservi par la GRC, et de trois autres membres tout au plus. Ils sont nommés par décret du gouverneur en conseil.

Aucun membre de la GRC ne peut être autorisé à faire partie de la Commission.

Le 20 février, la présidente de la CPP contre la GRC, Shirley Heafey, a annoncé la création d'une audience d'intérêt public dans le dossier de la conférence de l'APEC.

Gerald Morin (Saskatchewan), membre de la Commission, présidera l'audience. Les autres membres seront Vina Starr (Colombie-Britannique) et John Wright (Yukon).

 


ORDRE DU JOUR

Projet de loi sur l'identification par les empreintes génétiques

Deuxième lecture-Ajournement du débat

L'honorable John G. Bryden propose: Que le projet de loi C-3, Loi concernant l'identification par les empreintes génétiques et modifiant le Code criminel et d'autres lois en conséquence, soit lu une deuxième fois.

- Honorables sénateurs, je suis heureux de parler aujourd'hui du projet de loi C-3, Loi sur l'identification par les empreintes génétiques, qui prévoit l'établissement d'une banque nationale de données génétiques.

Grâce à cette mesure innovatrice, nous avons franchi une étape importante du programme d'action du gouvernement pour assurer la sécurité publique. Nous avons franchi la première étape en juillet 1995, en modifiant le Code criminel afin de créer une structure pour la délivrance de mandats relatifs au prélèvement d'échantillons d'ADN. Ces modifications ont permis aux juges des tribunaux provinciaux d'émettre des mandats autorisant la police à prélever des échantillons de substances corporelles, en vue de l'analyse des empreintes génétiques, auprès de personnes soupçonnées d'avoir commis une infraction désignée. Cette loi s'est avérée utile d'un océan à l'autre pour aider à élucider des crimes graves et violents.

Maintenant que cette structure relative aux mandats est bien en place, le gouvernement propose une structure juridique pour la conservation des échantillons d'ADN et des profils génétiques qui en résulteront. Voilà une autre mesure concrète pour mieux protéger les Canadiens contre les criminels violents.

Comme chacun le sait, l'analyse judiciaire des données génétiques a permis d'obtenir des condamnations et d'innocenter des personnes condamnées à tort. Toutefois, l'analyse génétique soulève aussi de graves inquiétudes par rapport à l'éthique et à la charte, car elle peut révéler nettement plus de renseignements sur une personne que les techniques traditionnelles comme l'analyse des empreintes digitales.

Compte tenu de la portée et de la nature des questions entourant l'utilisation et l'emploi potentiellement abusif de l'information génétique, le gouvernement a renvoyé ce projet de loi au comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes pour qu'il l'étudie brièvement avant qu'il ne soit lu une deuxième fois à l'autre endroit. Ce comité a entendu les témoignages de plus d'une trentaine de personnes représentant des associations policières, des groupes de défense des victimes, des organismes juridiques, des procureurs généraux provinciaux, des universitaires, des spécialistes de la protection de la vie privée et des spécialistes de la génétique médicale. Au cours de cette étude, le comité a pris grand soin d'établir un bon équilibre entre, d'un côté, la protection de la vie privée et la Charte et, de l'autre côté, l'objectif prépondérant de mieux protéger les Canadiens contre les crimes violents.

Je vais maintenant expliquer brièvement comment ces questions sont résolues dans le projet de loi dont nous sommes saisis.

Le projet de loi établit une banque nationale de données génétiques qui sera gérée par le commissaire de la GRC et qui sera constituée de deux principaux éléments: un fichier de criminalistique qui contiendra les profils génétiques établis grâce aux données retrouvées sur les lieux de crimes non élucidés et un fichier des condamnés qui renfermera les profils génétiques de contrevenants condamnés pour des infractions désignées au Code criminel. Grâce à cette structure, des données génétiques stockées pourront être comparées pour cerner des liens et contribuer à résoudre des crimes graves dans toute juridiction policière du pays.

Le projet de loi C-3 définit les circonstances dans lesquelles des échantillons corporels peuvent être prélevés auprès de condamnés et des profils génétiques peuvent être établis et stockés dans la banque de données. Lorsqu'une personne est reconnue coupable d'une infraction primaire, le tribunal rendra, sauf dans les circonstances les plus exceptionnelles, une ordonnance obligeant le contrevenant à fournir, pour analyse génétique, des substances corporelles qui seront ensuite versées dans la banque de données.

Lorsqu'une personne est reconnue coupable d'une infraction secondaire, le projet de loi autorise le tribunal à rendre une ordonnance obligeant le contrevenant à fournir, pour analyse génétique, des substances corporelles qui seront ensuite versées dans la banque de données. Le tribunal doit être assuré qu'il est dans l'intérêt supérieur de la justice de procéder ainsi.

La liste des infractions primaires et secondaires qui figure dans le projet de loi a été mise au point sur la double base de la nature sérieuse de ces infractions et de la probabilité de trouver des empreintes génétiques sur les lieux du crime. La liste des infractions primaires comprend les infractions les plus violentes et les infractions sexuelles pour lesquelles des empreintes génétiques seront très probablement trouvées sur les lieux du crime, des meurtres et des agressions sexuelles, par exemple. La liste des infractions secondaires comprend les infractions, aussi de nature très grave, pour lesquelles il est moins probable mais possible que des empreintes génétiques soient trouvées sur les lieux du crime, par exemple les vols à main armée et les incendies criminels. Par conséquent, pour ces infractions, les tribunaux auraient le pouvoir d'ordonner le prélèvement de substances corporelles.

Le prélèvement de substances corporelles après la condamnation de l'accusé établit un équilibre entre la nécessité primordiale d'assurer la sécurité de tous les Canadiens et la nécessité de respecter les droits protégés par la Charte canadienne des droits. L'accusé a le droit d'être présumé innocent et d'être protégé contre toute fouille et saisie déraisonnable.

La question de savoir quand les substances corporelles doivent être prélevées a considérablement retenu l'attention à l'autre endroit. La vaste majorité des gens consultés ont dit que le prélèvement de substances corporelles après la condamnation de l'accusé respecterait les droits garantis par la Charte canadienne des droits. Toutefois, ils étaient également d'avis que le prélèvement de substances corporelles au moment de l'arrestation ou de la mise en accusation du suspect pourrait fort bien être déclaré inconstitutionnel. Dans des avis juridiques demandés par le ministère de la Justice, trois des plus éminents juristes du Canada ont abondé dans le même sens.

Non seulement le projet de loi C-3 permettra le prélèvement de substances corporelles sur des délinquants dangereux après leur condamnation, mais il permettra aussi le prélèvement de substances corporelles sur des délinquants à risque élevé déjà en prison et condamnés avant l'entrée en vigueur du projet de loi. En vertu du projet de loi, un juge aurait le pouvoir d'ordonner le prélèvement de substances corporelles sur des délinquants déclarés dangereux, des agresseurs sexuels en série et des meurtriers ayant commis plus d'un meurtre. Le prélèvement de substances corporelles sur ces délinquants fournira à la police des outils fort utiles leur permettant d'élucider des crimes.

Les jeunes contrevenants seront traités de la même manière que les adultes en ce qui concerne le prélèvement de substances corporelles aux fins de l'établissement d'une banque de données. Les substances corporelles en banque seront analysées et le profil résultant de l'analyse sera versé dans le fichier des condamnés de la banque de données. Cependant, les profils d'identification génétique et les substances corporelles des jeunes contrevenants seront conservés moins longtemps que ceux des adultes. La période de conservation sera semblable à celle que l'on trouve dans les dispositions de la Loi sur les jeunes contrevenants en ce qui a trait au maintien de casiers judiciaires.

Le projet de loi C-3 autorise la GRC à établir la banque et à la gérer. Il est très important de signaler que l'accès aux profils génétiques du répertoire des contrevenants condamnés et aux échantillons sera strictement limité à ceux qui participent directement au fonctionnement de la banque.

Pour assurer l'utilisation appropriée de l'information contenue dans la banque de données, le projet de loi précise clairement que seul le nom rattaché au profil pourra être communiqué aux organismes d'exécution de la loi compétents dans le cadre d'enquêtes criminelles. Le projet de loi prévoit également des interdictions strictes ainsi que des peines sévères en cas d'utilisation non autorisée des échantillons ou des profils d'identification génétique.

À quelques exceptions près, les échantillons prélevés pour la banque de données seront conservés indéfiniment. La communauté scientifique a présenté des arguments persuasifs en faveur de la conservation des échantillons pour permettre d'adapter la banque aux progrès technologiques encore à venir. L'analyse des empreintes génétiques est une discipline qui évolue rapidement et, à mesure que la technologie progressera, les profils d'identification génétique d'aujourd'hui sont susceptibles de devenir désuets. Si les échantillons sont conservés, ils pourront être analysés de nouveau au moyen de la nouvelle technologie et la banque de données du Canada restera à la fine pointe du progrès.

Pour garantir le respect du droit à la vie privée de tous les innocents présents sur le lieu d'un crime, des victimes ou des citoyens respectueux de la loi qui accepteront volontairement de donner des échantillons de substances biologiques pour aider les policiers, le projet de loi prévoit l'interdiction permanente de l'accès aux données contenues dans le fichier de criminalistique lorsqu'elles se rapportent à une victime où à une personne rayée de la liste des suspects.

Le projet de loi C-3 prévoit également que les personnes devant fournir des échantillons de substances biologiques peuvent choisir le type d'échantillon qu'elles veulent donner. Les policiers doivent alors tenir compte des préférences exprimées, mais ne sont pas tenus de respecter ce choix, ce qui s'explique par les autres considérations qui entrent en ligne de compte. Par exemple, en Ontario, la Cour de justice de l'Ontario a récemment déclaré que le prélèvement d'échantillons de cheveux était anticonstitutionnel. En outre, les experts en criminalistique ont déclaré que le sang offrait les meilleures possibilités pour l'établissement du profil génétique. Gardant tout cela à l'esprit, le projet de loi C-3 permet aux policiers de décider en dernière analyse quel type d'échantillon prélever.

L'utilisation d'un tel système procurera de nombreux avantages. Je vais en énumérer seulement quelques-uns. Les corps policiers seront en mesure d'identifier et d'arrêter des récidivistes en comparant les résultats des analyses des substances prélevées sur le lieu du crime au fichier des condamnés. Ils pourront aussi déterminer si une série d'infractions a été commise par le même contrevenant ou si plus d'un criminel est impliqué. Les agents de police pourront comparer les profils d'identification génétique aux renseignements relatifs à d'autres infractions commises à l'intérieur et à l'extérieur de leur territoire. L'utilisation des profils d'identification génétique servira à mieux structurer les enquêtes policières, puisqu'elle permettra d'éliminer rapidement les suspects dont l'information génétique figure déjà dans la base de données, mais ne correspond pas aux éléments de preuve recueillis. Enfin, nous espérons que, en sachant que les empreintes génétiques seront utilisées pour élucider les crimes, les contrevenants seront moins enclins à récidiver.

En terminant, je dirai qu'il ne fait pas de doute que, ces dernières années, l'analyse des empreintes génétiques a fourni aux policiers un outil efficace pour faire enquête sur d'innombrables crimes graves. La banque nationale de données génétiques proposée dans ce projet de loi pourrait aider les policiers à identifier plus rapidement ceux qui commettent les crimes les plus graves et à leur imposer le châtiment qu'ils méritent. Les Canadiens peuvent continuer de marcher en toute sécurité dans les rues de leurs collectivités sachant que les forces policières canadiennes ont accès à un des outils les plus perfectionnés qui soit dans le monde.

J'exhorte les honorables sénateurs à appuyer le projet de loi C-3. J'ai hâte de participer à l'étude détaillée de ce projet de loi important lorsque le comité en sera saisi.

L'honorable Noël A. Kinsella (chef adjoint suppléant de l'opposition): Le sénateur Bryden voudrait-il répondre à quelques questions?

Le sénateur Bryden: Certainement. J'ignore si je puis y répondre.

Le sénateur Kinsella: Au cours de notre débat en deuxième lecture, nous traitons des principes généraux, et non de questions de détail. Il s'agit d'une question de principe lorsqu'un projet de loi présenté au Sénat traite de l'examen d'une loi. À l'article 13 de la page 9 de ce projet de loi, on dit qu'un comité de la Chambre des communes sera chargé de l'examiner dans les cinq ans suivant son entrée en vigueur.

Comme il s'agit d'une question de principe, le sénateur ne convient-il pas qu'il devrait être examiné par le Sénat et par la Chambre des communes? On parle ici d'un examen par l'une ou l'autre Chambre ou par les deux.

Le sénateur Bryden: Honorables sénateurs, la réponse est oui. Je sais qu'il s'agit d'une question de principe, plutôt que de détail, mais dans la documentation que j'ai parcourue, on parle d'un comité soit de la Chambre des communes, soit d'un comité mixte de la Chambre et du Sénat.

Sénateur Kinsella, je ne sais pas au juste s'il s'agissait là uniquement d'une proposition. Si tel est le cas, nous pourrons certes la considérer lorsque le comité sera saisi du projet de loi.

Le sénateur Kinsella: Ma question suivante porte sur un principe général, car elle concerne les mécanismes du projet de loi. Le pouvoir de prendre des règlements est accordé au gouverneur en conseil. Comme vous l'avez bien expliqué, le projet de loi tente de maintenir ou de refléter un équilibre. Je crois que, dans l'ensemble, il a atteint cet objectif.

Pour éviter que cet équilibre soit rompu par le pouvoir de réglementation que le projet de loi confère au gouverneur en conseil, le sénateur est-il d'accord sur le principe général que les règlements ne devraient être que ceux qui sont strictement nécessaires, par opposition à des règlements pris parce que le projet de loi accorde le pouvoir d'en prendre?

Le sénateur Bryden: Si je comprends bien les lois, leur rédaction et leur interprétation, les règlements doivent être conformes non seulement à un article précis du projet de loi, mais avec le droit dans son ensemble.

En tant que parrain, je prends ma responsabilité au sérieux. Lorsque le comité se réunira, il voudra peut-être songer à demander, en proposant un amendement ou un règlement, l'adoption de critères supplémentaires à ceux que j'ai pu trouver dans le projet de loi concernant le pouvoir discrétionnaire du commissaire de la GRC. J'emploie cette personne à titre d'exemple, car cette question l'intéresse de près. Je demanderai certainement d'autres explications au cours de l'étude en comité. Je suppose que le projet de loi sera, à un certain point, renvoyé au comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.

En réponse à la question générale du sénateur, on peut avoir un article prévoyant des règlements. Cet article ne permet pas au gouvernement, par règlement, d'aller au-delà du principe général de la loi. Il se peut que nous devions prévoir, pour utiliser un terme que connaissent bien les gens d'en face, de façon plus précise le genre de règlements à prendre.

Le sénateur Kinsella: Je suis d'accord avec vous.

Honorables sénateurs, j'ai lu la partie du projet de loi qui porte sur les raisons pour lesquelles on conserverait les substances corporelles. D'après mon interprétation du discours que le sénateur a prononcé cet après-midi, il se pourrait que, dans l'avenir, de nouvelles technologies soient créées qui nous permettraient d'utiliser les substances stockées dans la banque. Le pouvoir de décider si une telle analyse est justifiée en raison de la découverte d'une nouvelle technologie ne serait pas assujetti au Parlement, mais relèverait du commissaire de la GRC. Je suppose que c'est une question qui a également attiré l'attention du sénateur et qui devrait être examinée en détail par le comité.

Le sénateur Bryden: Tout à fait. Je n'entends pas par là qu'il faille en limiter la portée. Par ailleurs, je n'ai pas pris connaissance de tout ce qui a été dit à l'autre Chambre, mais il nous faut nous renseigner auprès des témoins sur l'intention et sur la question de savoir si le projet de loi en limite vraiment la portée. Je suppose que l'idée, mais il ne s'agit là que d'une supposition, c'est que, comme pour toute autre technologie actuellement en développement, si on attend encore six mois, le niveau de précision de l'analyse pourrait être sensiblement amélioré. Il faudrait alors revenir à la case départ et tester de nouveau tous les détenus, et cetera. Néanmoins, il nous faut nous assurer qu'il n'y ait pas de risque d'abus du pouvoir discrétionnaire conféré au commissaire de la GRC ou à quelqu'un d'autre.

Le sénateur Kinsella: Il y bien des domaines qu'il serait intéressant d'explorer. Sur ce, je propose l'ajournement au nom de mon collègue, le sénateur Nolin, qui, je l'espère, prendra la parole demain.

(Sur la motion du sénateur Kinsella, au nom du sénateur Nolin, le débat est ajourné.)

(Le Sénat s'ajourne au mercredi 21 octobre 1998, à 13 h 30.)


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